En 2017 Emmanuel Macron faisait la promesse de la fin des zones…
Dans ma newsletter d’Avril, j’introduisais le débat sur l’interdiction de l’huile de palme. Je vous soumets aujourd’hui les arguments développés par Monsieur Patrick Pouyanné, président-directeur général de TOTAL.
Parmi les informations à partir desquelles je dois peser le pour et le contre de la décision à adopter il y a bien sur les arguments des professionnels de la filière.
« Les biocarburants sont une énergie renouvelable à part entière, produite à partir de végétaux. Ils sont une solution immédiatement disponible. La France fixe des objectifs toujours croissants d’incorporation de biocarburants dans le gazole et dans l’essence, de l’ordre de 8 % en 2019. Nous investissons en France sur le site de La Mède, un projet de reconversion d’une raffinerie d’hydrocarbures vers une plateforme d’énergies renouvelables, qui inclut la première bio-raffinerie française mais aussi une ferme solaire. Elle va permettre de localiser en France de la production d’un biodiesel qui va se substituer à du biodiesel importé. L’enjeu, c’est aussi de pérenniser sur le long terme 250 emplois directs et jusqu’à 1000 emplois locaux directs et indirects, et de concrétiser la volonté des autorités de disposer d’une industrie compétitive. Nous avons investi près de 300 millions d’euros dans cet équipement.
Pourquoi ne pas vous passer de l’huile de palme ?
L’usine a été conçue pour traiter différents types d’huiles : des huiles végétales comme le colza, le palme, le tournesol… et de 30 à 40 % d’huiles usagées, pour s’inscrire dans une filière d’économie circulaire. Pour être viable techniquement et économiquement, la bio-raffinerie a besoin d’un certain volume d’huile de palme durable car celle-ci est meilleur marché et cela permettra à notre unité d’être compétitive. En accord avec les autorités, nous avons volontairement limité l’huile de palme à moins de la moitié de la matière première que nous y traiterons. Toute l’huile de palme qui y sera utilisée sera certifiée durable selon les critères de l’union européenne, et par conséquent ne pourra pas provenir de terres déforestées. La production de biodiesel à partir d’huile de palme durable de La Mède n’entrainera d’ailleurs pas une augmentation en France de la consommation de cette matière première, puisqu’elle se substituera à des importations. Sans huile de palme, on constaterait d’ailleurs un report de la demande vers des huiles végétales aux rendements plus faibles comme le soja, dont la culture demande 10 fois plus de surfaces agricoles pour la même quantité produite. Plutôt que de condamner le palme sans distinction, je pense qu’il y a pour la France une opportunité à saisir : celle de contribuer à faire émerger une filière de l’huile de palme durable, et d’implanter en France une industrie de pointe, rentable, dans ce domaine. Les parlementaires français peuvent nous y aider.
Comment comptez-vous vous y prendre pour convaincre ?
En l’état actuel de la législation française, à compter de 2020, cette bioraffinerie n’est pas viable car elle souffrira d’un déficit de compétitivité contre les importations de biodiesel mais aussi contre ses concurrentes européennes qui bénéficient d’un cadre fiscal avantagé. Bien sûr, nous sommes conscients que défendre la cause de l’huile de palme, même durable, est une tâche compliquée. Nous sommes à l’heure actuelle difficilement audibles dans un débat où règne une grande émotion. Dans l’hémicycle, un député a expliqué qu’il votait contre La Mède parce qu’il était contre la déforestation. C’est un raccourci que je regrette, d’autant que ce n’est pas l’arrêt de La Mède qui ferait cesser la production d’huile de palme. Nous sommes bien sûr à l’écoute des députés qui voudraient nous proposer des idées pour soutenir le palme durable qui est aussi produit en Afrique, pas seulement en Asie du Sud-Est. Nous allons continuer de nous employer à convaincre, sans baisser les bras, et de manière transparente. Nous voulons nous appuyer également sur des faits nouveaux, à savoir la règlementation en cours d’adoption à l’échelle européenne pour bien distinguer l’huile de palme durable de celle qui a une incidence, même indirecte, sur la déforestation, en renforçant encore les critères de certification. Une solution équilibrée, respectueuse de la biodiversité et de nos emplois industriels, existe, j’en suis convaincu. »
J’attends vos contre-arguments.